vendredi 31 juillet 2015

La consommation des ménages marque le pas

Les dépenses des ménages stagnent depuis deux mois.Alors que le moral des patrons ­ne progresse plus, les doutes sur le rythme de la reprise resurgissent.


Ce n’est peut-être qu’une petite alerte sur le rythme de la reprise qui pointe son nez. Mais des indicateurs publiés ces derniers jours montrent que l’amélioration de la situation économique en France reste fragile. Au mois de mai, la ­consommation des ménages en biens n’a progressé que de 0,1 % après avoir stagné au mois d’avril. L’Insee table d’ailleurs sur une ­consommation des ménages totale – comprenant les services – de seulement 0,2 % au deuxième trimestre. « On voit que l’alignement des astres, c’est-à-dire la baisse du prix du pétrole, la dépréciation de l’euro et les taux d’intérêt faibles, ne peut être que temporaire », souligne Denis Ferrand, directeur général de COE-Rexecode. « Dès que l’effet pétrole s’estompe, les relais font défaut. Les Français ne peuvent pas consommer plus puisque l’emploi ne s’améliore pas encore. La situation du marché du travail et l’investissement, qui sont toutes deux liées, seront les clefs de cette reprise », insiste-t-il.

« Il n’y a pas de réel trou d’air », tempère pour sa part Benoît Heitz, économiste à la Société Générale. « La consommation a été très forte au premier trimestre et elle ne pouvait pas continuer à croître sur le même rythme. Il ne fallait pas s’emballer sur les chiffres du premier trimestre. » Sur les trois premiers mois de l’année, la consommation des ménages a bondi de 0,9 %, soit 3,6 % en rythme annuel, grâce à la baisse du prix du pétrole qui a permis au pouvoir d’achat de progresser rapidement. Mais, depuis mi-mars, le prix du baril de brut est remonté. La confiance des ménages, publiée par l’Insee est d’ailleurs stable depuis trois mois à 94 points, en dessous de sa moyenne de long terme qui se situe à 100. C’est un coup d’arrêt à une hausse quasi continue puisque, entre octobre 2014 et avril 2015, cet indicateur avait progressé de 8 points.

Déprime subjective

L’autre enquête qui inquiète certains économistes est celle du climat des affaires. Calculé par l’Insee, le moral des patrons a aussi marqué une pause en juin, à 97 points, c’est-à-dire en dessous de sa moyenne de long terme, qui est de 100. « Ce qui est frappant, c’est l’absence de ­confiance dans tous les secteurs de l’économie sauf la distribution. Or il n’y a pas de raisons objectives à cette déprime », estime Patrick Artus, chef économiste de Natixis. « Avec la baisse du coût du travail, les marges de l’industrie sont revenues à leur niveau de 2006. Cette décorrélation entre la situation des entreprises et le ressenti des patrons est une spécificité très française. En Italie, le moral des chefs d’entreprise a fortement grimpé depuis l’automne dernier », ajoute-t-il. Il est vrai aussi que, depuis 2012, les différents gouvernements ont annoncé l’imminence d’une reprise qui n’est jamais venue. D’où la prudence des chefs d’entreprise français, régulièrement échaudés. Bref, « cette année, l’activité économique sera seulement plus forte qu’en 2014, qui était une année de quasi-stagnation », conclut Benoît Heitz.

Les Echos, 30/06/2015

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