vendredi 14 février 2014

BFR, trésorerie et crise économique

Fonds nécessaire au financement du cycle d'exploitation, le besoin en fonds de roulement (BFR) constitue un point de rencontre privilégié entre différentes fonctions de l'entreprise : la production au travers des stocks, l'activité commerciale au travers des comptes clients et les achats au travers des comptes fournisseurs. Dévoreur de trésorerie, le BFR figure rarement comme un investissement à part entière, alors que son montant dépasse bien souvent celui des immobilisations et autres actifs fixes.

Des études, dont celle très récente de PwC, ont rappelé qu'avec un ratio BFR-chiffre d'affaires se situant en moyenne à 20 %, les entreprises françaises sont plus mal loties que leurs homologues américaines (15 %), britanniques (14 %) ou même espagnoles et portugaises (16 %)… Cette moyenne cache des situations très différentes et, dans ce domaine, mieux vaut être une grande entreprise de la distribution qu'une petite société opérant dans le secteur de la production. Résultat d'un rapport de force entre entités aux pouvoirs de négociation très inégaux (vis-à-vis des clients, fournisseurs, etc.), le BFR est une composante cruciale de la compétitivité d'une entreprise. Sa mauvaise gestion, en asséchant la trésorerie, la fragilise dangereusement.

La crise économique détériore la situation des BFR et des trésoreries, et elle aggrave les inégalités déjà flagrantes entre les différentes catégories d'entreprises. D'après la dernière étude d'Altares sur les comportements de paiement des firmes en France et en Europe, plus des deux tiers des entreprises françaises règlent leurs factures au-delà des délais contractuels. Si 37 % des sociétés de moins de 10 salariés règlent leurs factures à temps, seules 9 % des entreprises de plus de 250 salariés respectent les délais. Au niveau européen, c'est l'Allemagne (encore elle…), avec près de 80 % des entreprises respectant leurs délais de paiement, qui affiche les meilleurs résultats, et la traditionnelle coupure entre l'Europe du Nord et l'Europe du Sud se confirme, l'Italie, l'Espagne et le Portugal enregistrant les pourcentages de loin les plus élevés pour les retards de paiement supérieurs à 30 jours. Quand on sait qu'à partir de 30 jours de retard, la probabilité de défaillance est multipliée par environ 6 et qu'une défaillance d'entreprise sur quatre est due à des retards de paiement, on mesure la gravité de la situation.

Rétablir dans nos économies discipline, honnêteté et respect des contrats est un impératif pour éviter une accélération du rythme des dépôts de bilan et ses conséquences désastreuses sur l'emploi. Comme le rappelle le rapport annuel de Winstone Management, la réduction des délais de paiement n'est pas une affaire technique ou légale, c'est une affaire de volonté, de travail et de pouvoir.

Marc Bertonèche

Source : Les Echos, 12/02/14


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