mercredi 6 août 2014

Narendra Modi ambitionne de faire renouer l’Inde avec une croissance de 7 %

Près de deux mois après son arrivée au pouvoir, le gouvernement indien dirigé par le nationaliste hindou Narendra Modi a présenté son premier budget, jeudi 10 juillet. Objectif affiché : relancer la croissance et attirer les investissements dans l'industrie et les infrastructures.


Pour autant, M. Modi a maintenu l'objectif de réduction du déficit budgétaire à 4,1 % du produit intérieur brut (PIB) pour l'année fiscale 2014-2015, qui s'achève fin mars.

Les investisseurs avaient été refroidis par la paralysie politique du précédent gouvernement et la multiplication des scandales de corruption. Le flux de capitaux étrangers vers l'Inde a chuté de moitié en un an, passant de 92 milliards de dollars (68 milliards d'euros) en 2012-2013 à 47,9 milliards de dollars en 2013-2014. Ces sommes sont pourtant indispensables à une économie dont la croissance a plongé sous le seuil des 5 % pendant deux années consécutives. Du jamais-vu depuis vingt-huit ans.

New Delhi a déjà autorisé l'entrée des étrangers au capital d'entreprises indiennes à hauteur de 49 %, contre 26 % actuellement, dans les secteurs de la défense et des assurances, et a promis d'uniformiser le régime fiscal sur tout le territoire d'ici à la fin de l'année.

L'Inde a besoin d'investir dans ses infrastructures, dont les insuffisances créent de l'inflation. Le manque d'entrepôts ou l'absence de chaîne du froid font en effet flamber les prix des denrées alimentaires. Dans ce contexte, la banque centrale du pays ne peut pas baisser ses taux, ce qui permettrait de relancer l'activité.

Le ministre des finances, Arun Jaitley, a dévoilé un arsenal de mesures pour éliminer les goulots d'étranglement de l'économie indienne, comme des exonérations fiscales pour les investissements dans les infrastructures, un assouplissement des règles dans les partenariats public-privé et une nouvelle plate-forme unique – la « ebiz » –, pour délivrer toutes les autorisations requises.

La faiblesse en équipements freine le développement de l'industrie, seule à pouvoir absorber le million de jeunes Indiens qui arrivent chaque mois sur le marché du travail. Pour relancer la croissance du secteur manufacturier qui n'a pas dépassé 0,2 % ces deux dernières années, M. Jaitley a annoncé des incitations fiscales et promis de renforcer les zones franches, notamment dans l'industrie électronique ou le solaire.

MARCHÉS DÉCONCERTÉS

« C'est un budget conçu pour déclencher les applaudissements de tous les côtés », écrit le quotidien The Business Standard. L'orthodoxie doit rassurer les marchés, sans que l'exécutif renonce aux programmes sociaux hérités du Parti du Congrès. Il a même prévu d'augmenter les fonds alloués à la distribution de denrées alimentaires à prix subventionné.

Mais ce nouveau budget, prudent et consensuel, n'a pas offert le « big bang » de réformes libérales attendu par certains. Les nombreuses restrictions qui protègent le secteur de la grande distribution sont conservées sauf dans le commerce électronique où les étrangers peuvent désormais détenir la totalité du capital d'une entreprise indienne (contre 51 % dans le secteur). Le groupe français Carrefour a d'ailleurs annoncé, le 7 juillet, qu'il allait fermer ses cinq magasins de gros dans le pays.

C'est au niveau de la méthode employée que le gouvernement indien marque sa différence.

M. Jaitley a prévenu que chaque dépense devait être accompagnée de résultats et a annoncé que le programme de garantie de cent jours d'emploi dans les zones rurales devait être orienté vers des « tâches plus productives et avec des créations d'actifs ».

Les subventions devront aussi être mieux ciblées pour bénéficier à ceux qui en ont besoin. Représentant 2,3 % du PIB, elles servent surtout à diminuer les prix de l'essence ou des engrais. Plutôt que de garantir un prix minimum agricole ou de subventionner les engrais, New Delhi explore d'autres voies, comme celle d'un revenu minimum pour les agriculteurs.

Ce budget « marque le début du chemin à parcourir pour atteindre une croissance de 7 % à 8 % d'ici trois à quatre ans », a prudemment annoncé le ministre.

Les marchés ont été déconcertés. Après avoir enregistré une baisse, l'indice de la Bourse de Bombay a finalement légèrement augmenté. « Un retour sur la bonne voie, mais il reste des kilomètres à parcourir », titrait, vendredi, le quotidien Hindustan Times.

Le Monde, 7/07/14

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